Carnet de voyages en Nouvelle-Zélande, Europe et Amérique du Sud
Organiser ses souvenirs

Organiser ses souvenirs

C’est toujours difficile d’amasser et ramener des souvenirs quand on part pour plusieurs mois avec un seul bagpack sur le dos. Peu de place pour autre chose que le strict nécessaire. Au pire on achète quelques épices, un magnet complètement kitsch, ou un petit kiwi en peluche qu’on prendra en photo dans chaque lieu visité. Mais chaque objet implique plusieurs grammes en plus à notre carapace, déjà peu légère. Alors ce que l’on récupère se garde dans un coin de la tête, sur la carte SD de l’appareil photo ou inscrit dans le carnet de voyage, au milieu des idées et des impressions notées lors d’une pause à la terrasse d’un café, ou entre deux secousses dans un bus asiatique.
Une fois rentré à la maison on range le sac et les cahiers, on transfère les photos de l’appareil à l’ordinateur, on raconte quelques anecdotes aux copains pendant les premières semaines. Puis le quotidien nous rattrape, et analyser la soirée de la veille prend plus d’importance que parler de cette rencontre dans les ruelles de Trinidad, avec des personnes qu’on ne reverra sûrement plus jamais.

Albums photos

Mes voyages au long cours, et mes années d’étudiante, ont été rythmés par des tri et des impressions de photos, pour en faire de beaux albums. J’ai grandi dans une maison remplie d’albums, que je connais par cœur, sensibilisée très tôt à la finesse de l’argentique et d’un visage capturé sur le vif, ainsi qu’à la petite annotation à côté d’un portrait, qui permet de ne pas oublier les dates. Alors garder la chronologie du voyage, et montrer aux parents – qui n’ont pas Instagram – par où je suis passée, était tout à fait naturel pour moi. J’ai fais cela à mon retour de Nouvelle-Zélande, et j’avais même imprimé mes articles de blog pour les faire lire à ma mamie, afin qu’elle ait une idée plus concrète de mon parcours.
Puis, une fois ma Nouvelle-Zélande et l’Asie du Sud-Est imprimées, et rangées sur mes étagères, j’ai laissé la vie (re)prendre son cours. Les journées parisiennes se sont enchaînées, rythmées par des voyages réguliers. Je prenais toujours autant de photos, mais je n’avais pas envie de passer mes soirées à trier les souvenirs de mes excursions. 2012 est passée, puis 2013, 2014, et maintenant 2018 est bien entamée. Il a fait un temps pourri cet hiver, j’en ai profité pour passer plusieurs soirées sur mon ordinateur et trier six ans de photos, pour les ranger dans un album.

Trier des souvenirs

Trier des photos, trier les souvenirs. Quel travail de titan. Plusieurs giga s’accumulent dans nos ordinateurs et nos disques durs. On n’ouvre plus les dossiers, on a oublié comment s’appelait ce Néerlandais qui a posé avec nous sur une plage cambodgienne. Quel était le goût de cette Bintang partagée sur la plage de Seminyak, quelques heures avant de reprendre l’avion vers l’Europe?

Et pourquoi a-t-on pris cette photo? J’ai lu un article dernièrement sur ces images qui s’accumulaient dans nos smartphones, et qu’on ne regardait plus. On n’imprime plus nos souvenirs. On sort trop souvent nos portables pour les brandir en pleine rue, pour une lumière particulière ou une jolie perspective. A coup de dizaines de photos par semaine, le compte est vite fait. Pourtant, on n’en regardera pas la moitié, oubliées dans les limbes de l’iPhone, entre un burger saignant et l’énième bébé né cette année. Car finalement un coucher de soleil ressemble toujours à un coucher de soleil, qu’il soit pris depuis le Pont Neuf ou sur une plage normande.

Puis, en fouillant, pour savoir lesquelles choisir et imprimer, je suis retombée sur les photos que j’avais oubliées. Un fou rire immortalisé, un selfie rempli de sourires et de regards hagards en pleine soirée, la première photo d’une amitié – à l’époque tellement anecdotique que l’image a failli disparaître, ou d’autres petites perles à destination ultra-confidentielle. Je me suis empressée de les envoyer aux amis, pour rire un bon coup, ou mieux les ranger cette fois-ci.Imprimées demain, elles seront annotée d’une date, ou d’un lieu. Et dans dix ans, je m’en souviendrai encore quand je tournerai les pages de cet album que, contrairement à mon iPhone, je n’aurai pas perdu.

J’ai toujours cette agréable impression de passer à autre chose une fois que j’ai trié et ranger mes affaires. Les photos en font partie. Une fois collées dans un album, je peux passer à autre chose, à une nouvelle étape de ma vie. Cela semble complètement superficiel, mais il n’empêche que j’ai vraiment l’impression d’avoir mis mes souvenirs dans un placard, et fermé la porte. Pour la réouvrir plus tard, avec plaisir.

La deuxième conséquence de ce tri est que je réfléchi maintenant à deux fois avant de prendre une photo. Lors de notre excursion à Berlin il y a trois semaines, j’ai arpenté la ville avec une attitude différente, pour éviter de passer des heures à effacer ou ranger mes images. Ma cousine avait mon appareil photo dans mes mains, et j’avais uniquement mon smartphone. Au final le résultat est le même, la majeur partie des souvenirs est dans ma tête.
Puis, je viens d’investir dans un nouvel appareil, comme à peu près tous les cinq ans, pour m’amuser à nouveau lors de mon prochain long voyage. Je rangerai le smartphone dans mon sac et j’aiguiserai mon œil pour ramener à nouveau plein de souvenirs…

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