J’avais prévu de m’arrêter à Jakarta pour aller voir un ami d’enfance, Olivier, actuellement en VIE (Volontariat International en Entreprise) dans la capitale indonésienne. Comme Kuala Lumpur, ce nom de ville exotique et lointaine me faisait rêver – comme encore Katmandou, Valparaiso, Ushuaia – et je voulais voir ce qu’il en était. C’est bon, j’ai vu, je ne reviendrai pas.
Imaginez une immense fourmilière, sur laquelle on aurait posé des milliers de routes et d’autoroutes, et au-dessus de laquelle un nuage de pollution stagne en permanence. Welcome to Jakarta. C’est une immense mégalopole asiatique, de trente millions d’habitants, bruyante, polluée, sale, absolument pas agréable. On ne trouvera aucun trottoir car tout se fait en voiture, ce qui oblige à marcher sur la route, ou à multiplier les taxis.
L’amabilité propre au pays était toujours là mais, comme dans toute capitale, la gentillesse se perd. Moi qui était habituée à voyager pendant vingt jours avec un mec, je me suis retrouvée tout à coup seule au milieu de la jungle et des regards insistants des hommes, ponctués de « hello mister » incessants (je crois que la différence entre miss et mister n’est pas acquise ici…).
Mais même au milieu des déchets on trouve des perles, et en errant dans un « bidonville » près du port à Kota, au milieu des bateaux et des ruelles, il y avait des nuées de gamins venant vers moi pour prendre des photos, pleins de rires et de sourires. Puis j’ai fini mon séjour au 52ème étage du Skye Bar, avec une vue imprenable sur la mégalopole tentaculaire, un mojito à la mangue à la main…
Après trois semaine de voyage, j’ai ramené quelques faits et anecdotes intéressantes sur l’Indonésie :
Sourires
L’Indonésien sourit tout le temps. Il ne haussera pas la voix, et tout passe (comme les Sénégalais…). Il ne connait pas le conflit, et n’est absolument pas stressé. Stress est un mot qu’il ne connait d’ailleurs pas. D’ailleurs, lorsqu’on l’a dit à notre chauffeur, cela l’a fait rire.
Ce qui amène de drôles de situation, comme lorsque notre chauffeur éteint les phares à minuit trente dans la forêt, et qu’un peu surpris et endormis, on gueule, pour qu’il nous réponde le plus naturellement du monde que c’est pour éviter les « ghosts » (fantômes). Euh… pardon?
Langage
L’indonésien s’écrit en alphabet latin, donc on peut le lire – contrairement à la Thaïlande. Ce qui fait qu’à force de les voir, certains mots rentrent dans la tête à la fin du voyage: selamat pagit / bonjour – terimakasi / merci – sama sama/ de rien – nasi goreng / riz grillé – masuk / entrée, etc. Mais les locaux parlent un anglais vraiment approximatif, qui rend la conversation très compliquée. On a déjà dit que l’Indonésien n’aime pas le conflit, et sourit tout le temps. Il ne répondra donc jamais non. Même quand il ne comprend pas. On récupère donc souvent des « yeah, yeah » à la place d’une vraie information nécessaire (heure du bus, destination du train, et si le nasi goreng est épicé).
Et cela donne de belles incompréhensions : connaissez-vous Nicolas Hollolande, qui est venu en hélicoptère à Ijen il y a deux ans ? Euh… François Hollande ? Mais non, Nicolas Hollolande !
Plus notre guide insistait, plus on était perdu. Hollande n’est pas venu en Indonésie depuis son élection, ni Sarkozy d’ailleurs… Mais si, avec caméras et guides, pour filmer le volcans ! Aaaaaaah, Nicolas Hulot ? Ben oui, Nicolas Hollolande. Okay. Dialogue de sourds je vous dis.
Corruption
Ce pays est corrompu jusqu’à la moelle. On paye pour tout, il y a même des taxes pour prendre l’avion, à l’aéroport, en plus de celles qu’on a payé avec le billet. J’ai détesté cette façon qu’ils ont de se serrer la main mollement en se filant des billets pour tout. On passe une barrière quelque part dans la forêt, et hop, 2000 roupies. On se gare sur une place de parking, 2 000 de plus. Ça nous est même arrivé avec Laure-Anne, lorsqu’on a débarqué à Bali et qu’on a passé une mini-douane, juste pour rejoindre le parking du taxi. Deux douaniers sont venus vers nous nous serrer la main, de cette poignée de main molle… On a dit bonjour et on est parties. On n’avait pas compris, et on n’aurait pas payé de toutes façons.
Je n’étais pas repartie aussi longtemps depuis mon retour de Nouvelle-Zélande en 2011. Ça fait du bien de se retrouver trois semaines dans le même pays, où l’on s’imprègne complètement et l’on prend vite ses habitudes avec la monnaie, le sourire, les petits mots de politesse – que l’on perdra aussi vite en rentrant.
Lorsqu’on est aussi loin de chez soi, on sent que le monde est à nous. Les gens qui nous entourent parlent mille langues différentes, les saveurs et les odeurs n’ont plus rien à voir avec celles de notre quotidien, et on prend des couleurs plein la tête. Plus de barrières. Alors forcément, quand on revient dans un 20m2, notre monde se rétrécit… vivement le prochain départ!
Ça donne à la fois le goût d’y aller et le goût de ne pas y aller 🙂 … C’est intéressant l’histoire des fantômes. S’ils existent il doit y en avoir des tas vu à quel point c’est surpeuplé. 🙂
Un rédacteur vraiment avisé ! félicitation