Mi-août, entre un mariage et deux poulets rôtis chez mamie, l’itinéraire auquel on réfléchissait avec Papa n’avait pas grand chose en commun avec ce parcours que l’on a fait pendant nos trois semaines au Pérou. On y a un peu plus réfléchi en septembre, on a conjugué montagnes avec Océan Pacifique, et rester un peu plus longtemps dans la région d’Arequipa s’est imposé. On était fatigués de nos réveils à l’aube, de l’altitude et des trajets en bus, alors une fois posés à l’hôtel, à deux pas de la Plaza de Armas – place centrale de toutes les villes péruviennes, et sud-américaines – on a tout de suite su qu’on se sentirait bien ici.
Arequipa, la Cité blanche
Après Cusco et les crêpes, c’est autour d’une bonne bière IPA que j’ai encore retrouvé Marie, pour se raconter nos dernières péripéties. Puis, on s’est attablé tous les trois à Chicha, le restaurant du chef Gaston Acurio. La gastronomie est un art à Arequipa, qui n’a rien à envier à Lima sur ce point là. On trouve toujours de quoi manger pour un ou deux euros sur le marché, mais les tables des grands chefs se multiplient, et il faut presque tout le temps réserver pour pouvoir s’attabler au Chicha, ou au ZigZag, lieu qui, pour mon père et moi reste la meilleure table de tout notre séjour péruvien. Le patio de notre hôtel, et la petite ratatouille que nous y avons cuisiné n’avait pas à rougir non plus. L’espace convivial du lieu nous a en plus permis de rencontrer cette famille Franco-Allemande incroyable, Anke et Guillaume, qui voyagent avec leurs trois enfants de 3 à 12 ans pendant un an autour du monde, et de partager avec eux souvenirs, et rêves de voyages futurs.
A Arequipa, j’ai embarqué mon père dans un tour guidé, à travers les ruelles blanches. La couleur de la ville vient des pierres des volcans environnants. C’est du sillar, une roche volcanique de couleur claire. Chaque maison du centre, ou presque, a été rénovée, pour mettre en valeur la pierre, et l’éclat du blanc. Ce qui en fait l’une des plus belles cités coloniales d’Amérique du Sud. Ce n’est pas ma préférée, mais entre le couvent, la Cathédrale impressionnante et l’histoire de la ville, l’ambiance vaut le détour. Les volcans El Misti et Chachani, imposants, subliment l’horizon. Si en plus, on arrive à se faufiler, via un des cafés, sur un des toits de la Plaza de Armas lors du coucher du soleil, le spectacle est magnifique.
Dans cette ville, la deuxième du Pérou, a été construit en 1579 le Covento de Santa Catalina de Siena. Une riche Espagnole a donné tout son argent pour que des jeunes filles, dès 12 ans, puissent y entrer, apprendre à réciter des prières et ne jamais en sortir. Les premières n’étaient que des espagnoles. Elles n’avaient pas d’enseignement pendant les premières dizaines d’années, et lorsqu’elles allaient au parloir, elles devaient être voilées, pour ne pas qu’on voit leur beauté. Quelle vie. Il reste une vingtaine de sœurs aujourd’hui, qui ont une vie beaucoup plus libre, et agréable si l’on peut dire. Enfin, le propos de cet article n’est pas la religion, même s’il y aurait beaucoup à dire sur le catholicisme en Amérique latine. Mais ce couvent vaut le détour, car le lieu est magnifique. Il y a des dizaines de ruelles et pleins de petites maisons. C’est une ville dans la ville, dont les murs sont rouges ou bleus, de ce bleu marocain que l’on trouve dans les jardins de Majorelle. Les influences arabes sont très importantes à Arequipa. Les Espagnols ont ramenés les Maures, Séville et Grenade dans leurs valises. L’architecture et le jeu des couleurs, sublimé par les roses grimpantes et les fleurs printanières, m’enchantent. Je ne sais plus où poser mon objectif.
On a passé les derniers jours à se balader, entre le centre et les quartiers de Yamahuara et de la Recoleta, faisant des pauses aux stands jus de fruits du marché ou chez Iberia, pour remanger enfin du bon chocolat.
Bol d’air vert au Canyon del Colca
On décide de se rendre au Canyon del Colca pour voir les condors, et on en repart enchanté par les paysages, et le calme qu’il en émane.
Comme souvent au Pérou et en Bolivie, tout est plus simple avec un tour organisé. On vient nous chercher à notre hôtel et on nous emmène à destination en faisant quelques stops en chemin. A cet endroit précis, nous sommes à 4910 mètres au-dessus du niveau de la mer. Là à votre droite, une vicuna, en plein milieu de la réserve naturelle protégée des Salinas et Aguas Blancas. Ici, on va s’arrêter boire une infusion de coca parce que c’est bon contre le mal d’altitude. On longe des champs de lamas et d’alpagas, avec des petites vicuñas oranges et blanches qui gambadent au milieu, libres et sauvages. Par contre, personnellement je commence à en avoir marre de l’altitude, et de la guide qui nous explique depuis trente minutes quelle est la meilleure façon de bien mâcher les feuilles de coca, sans avaler. Enfin, on nous dépose à notre hôtel, à Yanque, au milieu de la Vallée del Colca.
Le groupe est parti, le bruit aussi. Nos chambres ont vue sur les champs, tout fonctionne aux panneaux solaires, ou presque. D’ici, nous partons faire une balade jusqu’aux ruines Uyo Uyo, traversant la rivière de Colca. Nous ne sommes pas encore dans le Canyon, mais la nature y est déjà magnifique, verdoyante et abondante. Rien à voir avec la sécheresse et le jaune ocre des altiplanos. Le soir, après un énième steak d’alpaga – oui, après le cochon d’Inde mangé à Chicha, je continue à manger local – nous avons le droit à une séance d’observation des étoiles via l’observatoire de l’hôtel. La Vallée de Colca était en effet le premier grand observatoire du ciel du monde, avant qu’Atacama ne lui vole la vedette. Ce soir, la lune montante, et le nuage de poussière volcanique venant des volcans actifs environnants, nous gâchent un peu le spectacle. Pourtant, via le télescope on verra tout de même les cratères lunaires. Pas possible d’apercevoir la Croix du Sud, mon symbole néo-zélandais, mais j’attends le Nord du Chili avec impatience pour continuer à observer cet incroyable ciel de l’hémisphère sud.
Le meilleur reste à venir, le lendemain. Le bus nous emmène jusqu’à Cruz del Condor, au début du Canyon. Bien que le Canyon del Colca soit l’un des plus profonds du monde, à cet endroit la distance qui nous sépare de la rivière n’est que de 2000m. Il n’empêche que je n’en vois pas le fond. Le Canyon s’étale sur plus de 100km et descend à plus de 3400m dans sa partie la plus profonde.
Une grande colonie de condors des Andes niche à Cruz del Condor, et en fonction de la météo, on peut les voir planer au gré des courants ascendants. Ils battent peu des ailes, et planent devant devant nous, majestueux. Le spectacle est époustouflant, je n’avais jamais vu un tel oiseau d’aussi près. On ne m’ôtera cependant pas de la tête cette étrange sensation de ne pas savoir qui de lui ou nous observe l’autre.
C’est à cet endroit que l’on a décidé de quitter notre groupe pour aller jusqu’au prochain village, et descendre dans le canyon. La guide a eu beau nous dire que ça allait être long, avec beaucoup de dénivelé, et qu’on risquait de ne pas trouver de transport pour retourner à l’hôtel – ah ces Péruviens et la rando! – on est tout de même parti d’un pas décidé vers Cabanaconde. Par chance, un taxi nous a pris au bout de cinq minutes, nous évitant une heure de marche. Puis, à 10h, on a commencé notre randonnée pour tenter d’atteindre l’oasis de Sangalle, au fond du Canyon. Comme tout canyon, on descend d’abord, pour remonter ensuite. La descente s’est effectuée le pas rapide, le but étant de voir ce canyon de plus près, via tous les magnifiques points de vue disséminés sur le chemin. Malheureusement, pour ne pas louper le dernier bus, à 14h, nous avons fait demi-tour avant d’atteindre l’oasis. Mais le jeu en valait la chandelle. Le petit tour en bus local, où on peut demander au chauffeur de nous déposer n’importe où en bord de route, aussi.
Tips numéro 12: on a vérifié, El Condor Pasa n’est pas qu’une musique reloue à la flûte de pan jouée dans les couloirs de la ligne 6. C’est bien un symbole du Pérou, aussi.